Fournir aux centrales solaires et éoliennes et aux industriels des services de contrôle et de maintenance à la pointe de la technologie. C’est le pari osé de Farasha Systems, une start-up marocaine créée en mars 2016 par un petit groupe d’ingénieurs marocains établis en France. Ils ont vu juste. En effet, si ce sont les multinationales qui raflent les gros marchés de développement et d’exploitation de centrales, ceux de moindre taille pourraient faire de bonnes affaires dans les services et la sous-traitance. Mais encore faut-il trouver le bon filon comme les fondateurs de Farasha systems. «Le plan Noor a été le déclencheur de notre idée dès 2013 car nous avons pressenti le développement imminent d’un marché des centrales solaires à grande échelle qui vont poser de nouveaux défis à leurs opérateurs», confie Abderahman Kriouile, CEO de la start-up. En clair, l’idée est de révolutionner les opérations de maintenance (OAM) en développant une offre innovante inspirée des nouveautés technologiques. «Nous étions et nous sommes toujours convaincus que les méthodes classiques d’OAM vont vite laisser la place à des pratiques nouvelles basées sur les avancées du digital, des capteurs communicants, de l’internet des objets, du traitement d’images et de l’utilisation des drones», détaille notre interlocuteur. Et ce n’est pas le recours aux outils technologies dernier cri qui est en soi innovant, loin de là. C’est aussi et surtout la prise en compte des spécificités climatiques et géographiques des zones d’implantations des centrales solaires et éoliennes dans le contexte marocain. «Notre offre prend en considération les niveaux élevés de salissures (poussières, vent sableux et tempête de sable, etc.) qui compliquent les opérations de maintenance et de contrôle», poursuit M. Kriouile.
Noor Ouarzazate a été le premier champ d’expérimentation
Pour concrétiser le projet, les jeunes entrepreneurs ont mis les bouchées doubles dès 2015 en brevetant deux procédés de détection de défauts sur les panneaux photovoltaïques et les miroirs CSP et de détection de fuite thermique. Une année plus tard, un premier produit minimum viable – première version du produit dans le jargon des start-ups – a déjà vu le jour pour être testé à partir de 2017 dans des conditions réelles dans le complexe Noor Ouarzazate. En fait, les équipes de la super-agence des énergies renouvelables Masen ont soutenu Farasha en lui ouvrant les portes des différentes centrales. L’objectif était de tester la solution sur un large éventail de technologies et de niveaux de puissances installées dans le complexe Noor. L’investissement initial est de 2,2 MDH constitués de fonds propres et de subventions. Un montant qui est loin d’être modique pour une start-up à l’état embryonnaire ou en période «d’idéation». Résultat des courses : les tests se sont avérés concluants et ont permis à Farasha de développer en 2017 un premier service ayant trait à l’inspection terrestre sur véhicule. De son côté, le deuxième service consistant en l’inspection par drones est en cours de finalisation et sera testé prochainement. Quid de la concurrence ? «Elle est inexistante sur le marché local, tandis qu’à l’étranger nos concurrents sont des laboratoires de recherche espagnols et allemands avec qui nous sommes à pied d’égalité puisque nous sommes à la recherche de solutions innovantes adaptées aux conditions climatiques et spécificités géographiques du Maroc», rétorque M. Kriouile.
Centrales, industriels et constructeurs en ligne de mire
Concrètement, les deux solutions permettent de détecter rapidement les défaillances pour les corriger et optimiser le productible renouvelable. Mieux encore, elles peuvent être utilisées pour l’inspection en l’état des installations industrielles et des ouvrages d’art en utilisant différentes techniques (thermographie, radiométrie, traitement d’images, photogrammétrie). Si la première cible de la pépite est les exploitants de centrales et des installations solaires et éoliennes, la seconde est beaucoup plus large (industriels, constructeurs et agriculteurs). L’offre de Farasha séduit déjà auprès des opérateurs du secteur solaire. «Farasha systems prouve que la jeunesse marocaine est capable d’exceller et que l’innovation n’est pas l’apanage des groupes internationaux», témoigne Anas Raisuni, le patron de la filiale marocaine du groupe espagnol Sener, un des principaux contributeurs et développeurs du complexe Noor.
Autre signe de reconnaissance des réalisations de la start-up : trois prix discernés dont deux en France (Meetafrica, MVP22 et PACEIM) et une incubation au Green Business Incubateur du Cluster solaire marocain initié et géré par Masen. Parallèlement à la R&D qui demeure le nerf de la guerre, la start-up a démarré la prospection de ses clients potentiels et a déjà réalisé ses premières prestations auprès d’Acwa Power et la plateforme de recherche de Masen à Ouarzazate. «Nous sommes en discussion avancée et estimons aboutir à un premier contrat très prochainement», s’enthousiasme le CEO de Farasha Systems, qui a roulé sa bosse dans la recherche et l’enseignement à Grenoble avant de revenir au bercail.
Toutefois, le défi majeur est de pouvoir lever des fonds auprès d’investisseurs pour passer à un palier supérieur, à savoir l’amorçage. Ce défi est vraiment de taille vu l’absence de véritable écosystème entrepreneurial malgré quelques initiatives publiques et privées.
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